La finalisation de la synthèse du débat national sur la transition énergétique est fixée aux alentours du 18 juillet prochain, mais ce n’est pas tant l’approche de la date butoir que les étapes de cette finalisation qui divisent.
Le 20 juin dernier s’est tenu l’avant-dernier conseil national du débat, c’est à cette occasion que des tensions ont opposé le Medef, la CGT et la FO aux ONG environnementales. C’est suite au refus des deux syndicats et de l’organisation patronale, de la méthode de Laurence Tubiana, facilitatrice du débat que les oppositions ont éclaté, les syndicats et le Medef ont été jusqu’à menacer de quitter la table.
Ces derniers ont justifié leur emportement par leur attachement à la représentativité de chaque acteur du débat national sur la transition énergétique, ce à quoi les associations rétorquent qu’il s’agit en réalité d’un affaiblissement des négociations finales. Néanmoins, Laurence Tubiana demeure sereine et « ne désespère pas » de parvenir à certains accords allant au-delà des revendications des 7 groupes de travail.
La synthèse finale intégrera la synthèse des débats régionaux dont la présentation était prévue pour le 8 juillet prochain, la ministre de l’énergie souhaitant conserver l’intégration d’une approche ascendante.
La version définitive devrait être envoyée aux membres du conseil à partir du 9 ou 10 juillet, ce qui leur permettra de clairement définir leurs positions pour la séance finale du 18 juillet.
Le refus du Medef et des deux syndicats d’examiner le document rédigé par le secrétariat général et intitulé « priorité établies par les membres du conseil national du débat au sein des recommandations de ses groupes de travail » a été motivé par un souci de représentativité.
En effet, ce document illustre des partis pris concrets de la part des membres des groupes de travail sur la transition énergétique, par exemple, sur 36 membres, 27 sont favorables à l’initiative de rénovation du parc de bâtiments existants, 12 préconisent la mise en place d’une obligation, tandis que 19 membres issus de 6 collèges différents recommandent une contribution climat-énergie. D’autres encore, 12 au total issus de 5 collèges distincts veulent favoriser le « facteur 2 », soit la division par deux de la consommation énergétique d’ici à 2050.
La facilitatrice du débat a justifié cette exigence de représentativité de la part de l’organisation patronale et des syndicats « Ce document ne leur paraissait pas prendre en compte la représentativité de chacun », une préoccupation apparemment récurrente dans les groupes de travail et comités issus du Grenelle. Le Medef, la FO et la CGT estimant disposer de plus de représentativité que les ONG, qui ne se trouvent pas encore concernées par les règles énoncées.
Souhaitant concilier les différentes parties au débat, Laurence Tubiana a présenté un « plan B », malheureusement mal reçu par les différents intéressés « Le plan B ne marche pas très bien, comme tous les plans B par définition » a admis la facilitatrice. Quant aux ONG, Matthieu Orphelin, de la Fondation Nicolas Hulot s’est avoué « très mal à l’aise » relativement au refus du Medef et des syndicats de débattre le document.
A ce sujet, Jean Patrick Masson, de Europe Ecologie Les Verts, représentant l’AMGVF, a déclaré « Il ne faudrait pas que la méthode aboutisse à refaire le match (…) Il y a une vraie vigilance à avoir, me semble-t-il à ce que l’on construise bien quelque chose, pas qu’on sorte seulement du « moi, je veux pas » ou « moi, je veux bien » ».
C’est essentiellement entre Marc Jedliczka, Stéphen Kerckhove et Jacky Chorin, respectivement vice-président du Cler, délégué général d’Agir pour l’environnement et représentant FO, que les tensions ont été les plus vives.
Le vice-président du Cler a le premier, brisé la glace « On a face à nous des partenaires qui n’ont pas bougé d’un iota (…) Ce n’est pas l’écologie contre l’économie, mais l’intérêt général contre les intérêts particuliers » soulignant sa volonté de sortir de ce qu’il qualifie de « débat manichéen ».
Le délégué général d’Agir pour l’environnement a réaffirmé son souhait d’un débat « lisible, stable », puis s’est adressé à Laurence Tubiana « comme ce que vous souhaitez pour le cadre de politique énergétique ». Pour ce dernier les ONG ont conservé une certaine cohérence dans leur ligne de conduite, celles qui refusaient de débattre n’ont pas intégré le conseil national du débat « Certains syndicats n’acceptent pas la charte du débat et sont quand même là. C’est une simple question que je pose aux syndicats : voulez-vous un compromis ou pas ? »
Le représentant FO a estimé nécessaire de « mettre les points sur les i (…) En France, l’intérêt général, c’est le Parlement, il ne nous est pas demandé de légiférer. Je suis représentatif, infiniment plus que notre collègue. Je rends compte à des mandants. Ce n’est pas une ONG qui peut nous virer, c’est le gouvernement. C’est un peu facile de nous dire qu’on refuse de bouger. L’argument peut être renvoyé : acceptez-vous une expérimentation du gaz de schiste ? »
Jacky Chorin a souligné son hostilité à l’objectif fixé par François Hollande relatif à la réduction de 50% de la part du nucléaire dans le mix électrique d’ici à 2025, s’opposant à la proposition de la facilitatrice qui visait à établir des recommandations sur la procédure censée pallier au problème des réinvestissements à venir dans le parc de production d’électricité.